Unité et Action CDFN DES 24 et 25 SEPTEMBRE 2024

FACE A L’AFFRONT DEMOCRATIQUE : MOBILISER LE MONDE DU TRAVAIL

L’actualité politique et sociale est bien entendue dominée en France par la nomination – après 3 mois de manœuvres dilatoires de la part du pouvoir en place – d’un gouvernement dont la nouveauté, toute relative du reste, s’arrête à la liste des noms et chargé par le Président de poursuivre voire d’aggraver la politique libérale et autoritaire à l’oeuvre depuis 2017. Désavouée par les élections législatives, cette ligne ne peut survivre qu’avec la bienveillance d’un Rassemblement national édifié par le Président en arbitre de la situation politique, dernière étape avant d’en devenir possiblement le maître.

Mais, pour Unité et Action, il convient de ne pas oublier, ni sous estimer, l’ampleur des menaces qui pèsent sur la paix et les libertés démocratiques ou sociales dans le monde, menaces d’abord nationalistes, largement générées par le maintien de logiques capitalistes débridées, et dont le RN, comme l’AFD en Allemagne ou Fratelli d’Italia et tant d’autres formations d’extrême droite en Europe et ailleurs, constitue la déclinaison française.

La guerre se poursuit et s’installe dans la durée en Ukraine, sans perspectives autres qu’un épuisement des protagonistes, l’alourdissement du nombre de victimes civiles et militaires et la consolidation d’un climat général de méfiance entre l’Union européenne et la Russie soumise à la dictature du régime Poutine. Au Moyen Orient, ce sont là aussi les populations locales civiles qui souffrent le plus, en Palestine, en Israël et maintenant au Liban de l’engrenage sans fin des représailles respectives et de l’incurie des gouvernements nationalistes et religieux locaux, qu’il s’agisse de la majorité parlementaire qui soutient Netanyahou, du Hamas ou du Hezbollah, tous unis pour empêcher toutes issues pacifiques au conflit. Pendant ce temps, le nombre d’enfants tués en 9 mois à Gaza est plus élevé que le nombre total d’enfants tués en quatre ans de guerres dans le reste du monde. Et, dans une large indifférence, le Soudan voit se multiplier les massacres de populations désarmées, et l’Afghanistan la lente et inexorable disparition des rares espaces de liberté laissés aux femmes.

Et pourtant les peuples ne se laissent pas faire, ils résistent, comme ces prisonnières politiques en Iran qui entament une grève de la faim, voire aux Etats Unis où là encore les femmes, les minorités, les syndicats refusent la fatalité du retour de Trump au pouvoir et soutiennent la candidature de Kamala Harris.

Dans ce monde plus dangereux qu’il ne le fut jamais depuis la fin de la Guerre Froide, alors que les discours écologistes résistent peu, où que ce soit, à la démagogie électoraliste des marchands d’illusions productivistes, la démocratie reste un acquis fragile et précieux.

Encore faut il ne pas la détourner de son sens profond en méprisant systématiquement l’expression du peuple, notamment lorsqu’elle émane des urnes.

Ainsi en France, comme en 2005 après l’échec du TCE, comme en 2012 après le virage libéral d’un pouvoir pourtant élu pour éviter le maintien de la politique libérale de Nicolas Sarkozy, le président Macron, élu et réélu y compris par une partie de l’électorat de Gauche pour barrer la route au RN réédite ces pratiques de détournement – de hold up – démocratique par ses manœuvres, aujourd’hui temporairement couronnées de succès, pour écarter la perspective d’un gouvernement issu du NFP, dont la FSU soutenait le programme, et construire une combinaison ministérielle incarnant la Droite la plus libérale, la plus conservatrice voire réactionnaire, escomptant ainsi le soutien tacite du RN au moment du vote du budget.

Comment ne pas voir qu’en niant la volonté citoyenne exprimée par le vote, tout en opposant la répression et la surdité aux luttes sociales et syndicales massives (en 2003, en 2010, en 2016, en 2023…) c’est la confiance envers la forme démocratique qui s’en trouve érodée dans la population, situation grosse de toutes les dérives autoritaires et anti sociales ?

Car la composition de ce gouvernement, au-delà du casting, ne fait que confirmer la volonté du Président battu de conserver la main et de poursuivre la même politique d’injustice fiscale, de détricotage du droit du travail, d’affaiblissement des services publics à commencer par la Santé, en grande souffrance – et de la Fonction publique, d’État comme territoriale et de large indifférence envers une Education nationale considérée comme l’Ecole des pauvres, et donc essentiellement comme un coût à comprimer toujours plus. Et que dire du choix de certaines personnalités qui se sont signalées par leur homophobie, leur hostilité aux luttes féministes dont la terrible actualité marque pourtant la nécessité d’une prise de conscience et d’une vigilance toujours plus fortes ?

Face à cette situation, le risque pour le syndicalisme de transformation sociale serait de céder à une sorte de résignation née du spectacle d’une scène politique qui serait sortie inchangée de la période électorale de juin et juillet dernier. Pour Unité et Action, il ne saurait en être question.

Ainsi, Unité et Action demeure fière de l’action engagée au printemps dernier pour faire face au péril de prise de pouvoir imminente du RN, antidémocratique et anti social, et consistant à soutenir, comme la CGT, moins la coalition du NFP que son programme dans lequel, quoique imparfait notamment sur la question de la LTFP, la FSU s’est reconnue en grande partie. C’est par l’engagement déterminé du syndicalisme de transformation sociale que s’explique non seulement la défaite du RN, certes porté à un niveau de représentativité jamais atteint, mais aussi le choix par l’électorat d’une victoire relative du NFP, cette victoire scandaleusement niée par E. Macron.

La question se pose de poursuivre le dialogue avec les forces politiques de Gauche, les associations et bien évidemment les syndicats qui le souhaitent, dans des cadres non contraignants, jamais décisionnels, toujours dans le strict respect de l’indépendance syndicale, mais qui permettent un enrichissement mutuel et d’abord par des propositions en vue d’un programme de véritable rupture avec les politiques libérales à l’oeuvre depuis des décennies.

Le contexte politique, entre aggravation des contre réformes en perspective – maintien de la « réforme » des retraites, retour possible de celle de l’assurance chômage, nouvelles coupes budgétaires dans les services publics au motif de la lutte contre un endettement pourtant largement généré par les largesses fiscales au profit des plus riches, confirmation de nouvelles attaques contre le statut de la fonction publique, des logiques de précarisation des personnels mais aussi d’individualisation des rémunérations faute de revalorisation et de dégel du point d’indice, stagnation de pensions rongées par l’inflation…, réaffirmation du pseudo « chocs des savoirs » ou de la réforme des recrutements pour les enseignant.es – et présence d’une extrême droite plus que jamais aux portes du pouvoir, confère à notre syndicalisme une lourde responsabilité.

C’est pourquoi, au-delà des péripéties de l’actualité, Unité et Action, considérant que l’émiettement et la division syndicales sont l’une des sources de l’impuissance syndicale et donc du salariat, soutient le dialogue engagé depuis un an entre la FSU et la CGT, en vue de la construction d’une maison commune ouverte à toutes les organisations qui se retrouveront dans cette dynamique. Le congrès de Rennes aura à valider le processus de travail commun et de rapprochement, processus qui exclue toute possibilité d’absorption d’une organisation par une autre, ou de fusion qui aboutirait à la négation des patrimoines syndicaux respectifs.

Mais plus que dans les évolutions structurelles, certes déterminantes, c’est bien par la capacité du mouvement syndical à mobiliser largement le monde du travail qu’il sera possible de mettre en échec les contre réformes à venir, de porter les revendications – sur les salaires, les retraites, les conditions de travail, les services public, la démocratisation de l’Ecole etc.. – et d’écarter durablement l’extrême droite du pouvoir.

C’est pourquoi la FSU s’engage dans les mobilisations sectorielles en cours – comme à la PJJ – et mène campagne pour réussir, avec la CGT et Solidaires, la journée interprofessionnelle du 1er octobre, étape nécessaire pour élargir les luttes, toujours en recherchant l’unité syndicale la plus large.

Rachel Schneider, Emmanuel Mercier, Matthieu Leiritz