Parmi les leçons de choses que la crise sanitaire provoquée par le SARS-Cov-2 aura dispensées, il y a l’importance structurante que confère au modèle social le statut des fonctionnaires. Cette construction toute à la fois politique, législative et réglementaire fournit une dimension essentielle de l’incarnation de l’intérêt général dont ont la charge la fonction publique et les services publics.
Les observateurs avertis auront vraisemblablement noté une courte réorientation à 180° du discours gouvernemental sur les services publics, le temps de quelques, jours après la mi-mars. Les débats inhérents aux différentes perspectives du déconfinement, les premières confrontations à propos des voies et moyens de sortie de crises, auront vite montré qu’il s’agissait d’une sorte de « parenthèse enchantée » de la communication politicienne de ceux-là qui, au pouvoir, restent idéologiquement enserrés par la contemption de la dépense publique au profit du plus grand nombre et par la dévotion aux dogmes managériaux.
Malgré les errements de la politique d’appréhension puis de gestion de la crise épidémique, il serait seulement de mauvaise foi que de nier que les personnels de la fonction publique – à l’hôpital, dans les collectivités territoriales, à l’éducation nationale, dans l’enseignement supérieur ou partout ailleurs – ont fait face, se sont mobilisés par la seule force de leur sens de l’intérêt général, de leur culture professionnelle et du service public « à la française », et certainement pas par on ne sait quelle soumission à l’autoritarisme managérial ou à des injonctions incantatoires à la performance individuelle.
Ironie de l’histoire, il n’aura fallu que quelques mois pour que la réalité d’une crise sanitaire invalide les présupposés idéologiques qui ont accouché des quatre premiers titres de la loi du 6 août 2019 dite de « transformation de la fonction publique »1
Le titre V de cette loi est de nature différente puisque c’est celui qui traduit l’accord sur l’égalité professionnelle signé, notamment, par la FSU. La FSU avait d’ailleurs dénoncé que le reste de la loi affaiblissait les capacités pratiques de mise en œuvre des dispositions en faveur de l’égalité professionnelle.
Alors même que les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) sont prévus à la disparition par celle-là, ils n’auront jamais été autant réunis et n’auront fait la démonstration pratique de leur importance pour les personnels, pour leur protection sanitaire comme pour leurs conditions de travail, comme pour les services et établissements qui ont dû adapter au mieux leurs fonctionnements dans des modes dégradés. Il y a un vrai enjeu à préserver ces instances de représentation des personnels dont l’objet est d’aborder les sujets d’organisation du service public par le prisme de cet équilibre entre l’ensemble de ces problématiques.
La situation de crise vient rappeler aussi une évidence par trop oubliée par les affidés des politiques managériales et du fantasme de la « rationalisation » : le caractère essentiel, sine qua non, des dynamiques collectives pour faire le service public et garantir à la fois son efficacité et sa continuité.
Celles-ci sont d’autant plus assurées que les personnels ne sont pas mis en concurrence les uns et avec les autres, qu’ils et elles peuvent être convaincu-es que la gestion de leur carrière est réalisée hors de tout clientélisme et arbitraire, avec l’assurance que l’ensemble des données de chaque situation individuelle sont prises en compte. Cette conviction ne peut être acquise dans l’opacité de procédures de gestion, mais bien dans leur transparence, avec l’ensemble des éléments de comparaison accessibles aux représentant-es des personnels. Voilà qui redonne du muscle à la revendication de rétablissement des compétences des commissions administratives paritaires.
S’il avait été besoin de rappeler les enjeux syndicaux à combattre la plus grande énergie les agressions des politiques managériales à l’endroit du statut, la crise sanitaire s’en serait donc chargé !
La situation réactualise de bien des façons les enjeux à mener les batailles syndicales pour rétablir ce qui a été détruit.
Que les Diafoirus au gouvernement se le tiennent pour dit : avec nous, ils n’en ont pas fini !
Ensemble exigeons l’abrogation de la loi TFP !
Bruno LEVEDER (Snasub FSU)