UN AN DEJA … UN AN SEULEMENT

 

Il est des anniversaires qu’on souhaiterait ne jamais fêter.

 

12 mois déjà que le monde est frappé par l’épidémie de covid .

 

Le recul manque, naturellement, pour en apprécier les conséquences dans leur diversité et leur profondeur.

 

Quelques éléments cependant peuvent être distingués.

 

INTERNATIONAL

 

A l’échelle internationale, la vague épidémique n’a pas recouvert mais cependant freiné la vague démocratique.

 

La situation sanitaire a constitué un bon prétexte pour durcir la répression ou les moyens de contrôle des gouvernements autoritaires sur leurs peuples, comme en Russie avec l’emprisonnement d’Alexei Navalny ou à Hong Kong à travers la loi qui vient d’interdire les candidatures d’opposants démocrates au régime de Pékin.

Mais les peuples ne s’avouent pas vaincus : en Biélorussie, en Algérie où renaît la contestation (Hirak) ou en Birmanie, au prix d’une sanglante répression, les manifestants affrontent pacifiquement les cliques militaro – kleptocratiques locales.

 

L’Union Européenne n’est pas épargnée par les dérives autoritaires, à des degrés divers, depuis l’étouffementde la liberté de la presse dans les démocraties illibérales de Hongrie ou de Pologne, jusqu’au maintien d’un état d’urgence dont la banalisation en France devient préoccupante.

 

Leur commune incurie dans la gestion de l’épidémie a cependant permis la défaite du dangereux DonaldTrump et permettre peut être dans l’avenir celle de son admirateur fasciste Bolsonero, alors que l’ancien président Lula peut à nouveau incarner les aspirations populaires.

 

Sur un plan économique et social, la crise, frappant les populations les plus fragiles, par l’âge, la précaritéde santé ou d’emploi, a renforcé les inégalités mais également obligé les gouvernements à verser du sirop keynésien dans leur bol d’orthodoxie budgétaire. Que ce soit aux EU ou dans l’union européenne, de gigantesques plans de relance par l’investissement public soulignent l’importance de l’intervention des Etats, et les limites des dogmes libéraux dans une économie touchée par un ralentissement sans précédent depuis 1945.

 

Mais rien n’est acquis.

 

FRANCE

 

En France, le gouvernement et la majorité LREM, approuvés en cela par la droite LR, tout en soutenantl’activité par des mesures compensatoires comme le financement du chômage partiel, et au-delà de larevalorisation non négligeable obtenue par les personnels de santé, restent arc boutés dans leurconservatisme social : pas de remise en cause des cadeaux fiscaux aux plus aisés, pas de

 

RSA jeunes quand ceux-ci, étudiants et/ou salariés, souffrent particulièrement de la crise, pas de coup depouce au smic, y compris pour les « premiers de tranchée », pas de dégel du point d’indice pour les fonctionnaires…

 

A l’inverse, en dépit d’un front syndical exceptionnellement unitaire (CGT – CFDT – FO – CFTC – CGC), le gouvernement persiste, dans le seul but d’économiser des dépenses, à réintroduire une

« réforme » très conservatrice de l’assurance chômage qui se propose d’inciter les chômeurs à retrouver plusvite un emploi par la baisse de leurs indemnités. Par ailleurs, les services publics, pourtant si encensés au plus fort de la crise épidémique, restent les parents pauvres des choix budgétaires de la majorité LREM, avec à nouveau des suppressions de postes, notamment dans l’EN.

 

Si la lutte contre le réchauffement climatique fait l’objet de quelques mesures, elles restent bien éloignées des recommandations émises par le conseil citoyen ou les organisations environnementales. Enfin, plusieurs réformes structurelles restent maintenues (LTFP) ou simplement repoussées après les élections de 2022, comme celle des retraites.

 

VIGILANCE DEMOCRATIQUE

 

Le pays ne sort toujours pas de la crise sanitaire, d’une exceptionnelle gravité, même si la campagne de vaccination progresse, mais bien trop lentement. La FSU est attachée à ce que nul ne soit exclu de l’accès aux vaccins, et à ce que la logique de santé publique prime sur la recherche du profit, c’est le sens de son engagement pour la levée des brevets sur les vaccins. Comme les personnels de santé, l’ensemble des travailleurs des services publics confrontés au contact des usagers ne devraient-ils pas être prioritaires dans l’accès à la vaccination ?

 

Englué dans une gestion chaotique de la crise, le président Macron semble de plus en plus tourné vers laquestion de sa réélection. D’où des gages de plus en plus nombreux donnés à l’électorat le plus modéré -notamment sur les questions sécuritaires – ou des opérations de diversions visant à détourner l’opinion desenjeux économiques et sociaux mais aussi, dans une stratégie aussi habile que risquée, à fracturer laGauche, ainsi des attaques contre un supposé « islamo gauchisme » qui sévirait, sans du reste qu’unedéfinition en soit jamais donnée (et pour cause) dans les universités.

 

Dans cette séquence, l’enseignement supérieur et la recherche auraient certainement gagné à une incarnationministérielle plus digne et respectueuse des libertés académiques que celle de l’actuelle ministre. La FSU et le syndicalisme ne seront pas dupes de ces grossières tentatives d’instrumentalisation de la laïcité. La liberté du choix des thèmes d’études par les universitaires, l’évaluation par les pairs sont les meilleures garanties, depuis toujours, de l’excellence de la recherche, face aux tentatives toujours présentes d’immixtion du pouvoir politique ou de celui de l’argent au sein des campus.

 

 

Par ailleurs, le syndicalisme, fidèle à son histoire, sera vigilant face aux menaces anti démocratiques et anti laïques, qu’elles viennent de l’extrême Droite nationaliste ou des forces religieuses intégristes de toutes origines, y compris islamistes, historiquement partout et toujours hostiles au mouvement social ainsi qu’aux combats pour l’émancipation des hommes, et d’abord des femmes. Les organisations laïques, longtemps soudées dans leur défense des principes républicains, gagneraient à surmonter des divisions aujourd’hui dépassées et à se rassembler dans un cadre commun.

 

DES MOBILISATIONS DIFFICILES ET NECESSAIRES

 

Le mouvement social, dont l’action demeure handicapée par le contexte épidémique, ne reste cependant pas inactif.

 

Qu’il s’agisse des puissantes mobilisations en faveur de l’égalité des droits entre les femmes et les hommes,notamment à l’occasion du 8 mars, des jeunes, des intermittents d’un monde sinistré de la culture et du spectacle, de multiples mouvements témoignent de l’absence de résignation dans une société pourtant durement touchée par l’épidémie et qui redoute dans l’avenir que la crise sanitaire se double d’une crise sociale.

 

C’est pourquoi les mobilisations de janvier et février dans l’éducation, quoique inégales selon les secteurs et les territoires ont été importantes et utiles, et c’est pourquoi la journée du 4 mars, impulsée par la CGT etsoutenue par la FSU, certes décevante, était nécessaire, dans un contexte où se multiplient les plans « sociaux », dont ne sont pas exclus les effets d’aubaine pour une partie du patronat.

 

Le recul gouvernemental sur le transfert des infirmières scolaires prévu dans la loi 4D prouve que l’alliance de la mobilisation massive de la profession, dans laquelle le Snics FSU a joué un rôle déterminant, et du dialogue avec les acteurs politiques peut déboucher sur une victoire syndicale.

 

Le 6 avril sera l’occasion pour la FSU de participer à une nouvelle mobilisation Fonction publique, sous desformes à apprécier dans les prochaines semaines en fonction des remontées de terrain, sur les questions de salaires, de moyens pour les services publics mais aussi de respect des métiers. En dépit des effets d’annonce du ministre Blanquer, les promesses de revalorisation des personnels de l’Education nationale restent en effet lettre morte. Après 10 années de gel du point d’indice pour l’ensemble des agents de la FP, alors que la relance de l’activité économique passe aussi par une augmentation du pouvoir d’achat, cette situation n’est plus acceptable et doit rester au cœur des mobilisations des mois à venir.

 

La recherche de l’unité constitue l’une des conditions nécessaires sinon suffisantes pour faciliter les mobilisations sociales.

 

C’est pourquoi la FSU poursuivra son engagement dans le collectif « Plus jamais ça », aux côtés de la CGT et d’autres syndicats et associations, dont les analyses ne sont souvent guère éloignées d’autres coalitions comme le « Pacte pour le pouvoir de vivre ».

 

C’est pourquoi la FSU, jamais résignée à la fragmentation syndicale, continue à travailler au rapprochementavec d’autres syndicats dont nous partageons l’essentiel des analyses et des luttes, notamment locales, et d’abord avec la CGT et sans exclusive.

 

RESPONSABILITES SYNDICALES

 

Enfin, un an nous sépare également des échéances présidentielles et législatives.

 

Le pouvoir actuel met tout en œuvre pour rendre inéluctable une réplique de 2017, avec une issue de plus en plus aléatoire.

 

De cette situation, l’actuel président est le premier responsable.

 

Par les déceptions engendrées, par l’imposture d’un positionnement ni droite ni gauche qui s’est avéré très rapidement la continuation aggravée des politiques libérales menées depuis trop longtemps, par des dérivesautoritaires, le long mépris des organisations sociales dont les syndicats et la surdité aux souffrances sociales, le président Macron, bénéficiant par ailleurs de la division persistante de la Gauche, a fait le lit d’un courant nationaliste, xénophobe et raciste désormais à la porte du pouvoir.

Le syndicalisme, notamment de luttes et de transformation sociales, ne peut se résoudre à ce duel annoncé, ni à la perspective d’un second quinquennat de destruction des conquêtes sociales, des services publics et de la fonction publique, ni, surtout, à l’hypothèse de l’instauration en France d’un régime autoritaire, dont leslibertés syndicales et les droits des salariés compteraient parmi les premières victimes.

C’est pourquoi le syndicalisme ne peut rester indifférent aux perspectives politiques des prochains mois.

Il est de sa responsabilité, par la mobilisation et le dialogue, et les élections locales de juin en constituant une première occasion, d’influer sur les programmes des partis de Gauche, dont le rassemblement est l’une des conditions pour éviter en 2022 un nouvel affrontement entre une candidature libérale et une candidature nationaliste.

L’issue quelle qu’elle soit, et sans tirer un quelconque trait d’égale gravité entre les deux hypothèses, enserait a minima de nouveaux reculs pour les salariés, voire pour les libertés démocratiques.

Un an déjà, un an seulement.